Jean-Charles Gil sur la pointe des pieds – L’EXPRESS
L’agenda culturel. Reconverti en artiste plasticien, l’ex-danseur étoile de Roland Petit recycle chaussons et pointes pour créer des œuvres uniques, odes à l’effort et à la transmission.
ll en a bavé, Jean-Charles Gil, pour atteindre les sommets de son art… « Mes pieds n’étaient pas prédisposés à la danse mais il n’était pas imaginable de renoncer », raconte-t-il aujourd’hui, après plus de vingt années passés à fouler les plus grandes scènes internationales et presque autant comme chorégraphe à la tête du Ballet d’Europe fondé à l’orée du XXIe siècle. Il y a eu les débuts chez Roland Petit qui le nomme danseur étoile en 1979, puis les tournées mondiales en « guest », du Ballet national du Canada au Béjart Ballet de Lausanne avec l’inoubliable Sacre du Printemps, en passant par le Met de New York, la Scala de Milan ou l’Opéra de Paris qui lui offre le rôle-titre dans Roméo et Juliette au milieu des années 1980, et enfin l’ultime étape étoilée au sein des Ballets de Monte-Carlo.
Qu’il ait dansé pour les autres ou fait danser les autres, cette histoire de pieds ne l’a jamais quitté. Un lien puissant tissé avec ses demi-pointes, nourri de sueur, de tourments, de joie aussi. Ces chaussons, qui sont pour un danseur une sorte de seconde peau, un témoin des doutes et des triomphes, un complice au long cours parfois mué en bouc émissaire, sont désormais au cœur de la création plastique de Jean-Charles Gil, 64 ans aujourd’hui. Il les recycle, les assemble en compositions, à mi-chemin entre l’installation et la sculpture.
Même s’il se consacre totalement à cette nouvelle forme d’expression depuis seulement cinq ans, l’ex-danseur-chorégraphe l’a longuement mûrie. En 1998, déjà, comme un exutoire qui le conduirait deux décennies plus tard à s’assumer plasticien à part entière, il avait élaboré une première œuvre à partir du parcours de la ballerine Paola Cantalupo, de ses chaussons portés petite fille jusqu’aux pointes arborées par la danseuse étoile des Ballets de Monte-Carlo. Puis, une fois l’aventure du Ballet d’Europe derrière lui, Jean-Charles Gil a pu donner libre cours à cet élan créateur. Sur la pointe des pieds, tant l’homme reste discret, œuvrant à l’abri des bruits du monde dans son domaine agricole sur les rives de la Durance. (…)